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Par Brigitte Rebetez

Quand le cœur est à la peine, qu’il n’est plus capable de propulser correctement le sang oxygéné dans l’organisme, on parle d’insuffisance cardiaque. «Lorsque la fonction de pompe du muscle cardiaque est affaiblie, les capacités physiques sont diminuées. Les symptômes cliniques dépendront du degré de sévérité de la pathologie, de son origine, de sa forme aiguë ou chronique», détaille le Dr Cyril Pellaton, chef du service de cardiologie du Réseau hospitalier neuchâtelois (RHNE).

“Au final, c’est le patient qui va faire la différence.” LUISA MARQUES INFIRMIÈRE SPÉCIALISÉE EN CARDIOLOGIE

Dre Sabina Rosset et l’infirmière spécialisée Luisa Marques dans la nouvelle filière d’insuffisance cardiaque de l’hopital de la Chaux-de-fonds, le 03 février 2022. Photos © Guillaume Perret / Lundi13

Suivi en trois phases
L’insuffisance cardiaque est considérée comme un problème de santé publique – en Suisse entre 12 000 et 15 000 personnes sont nouvellement diagnostiquées chaque année. Cette maladie concerne autant les femmes que les hommes. Elle représente une des principales causes des séjours à l’hôpital des personnes de plus de 65 ans et génère un taux de réadmission élevé, de l’ordre de 20-25% après trente jours. A l’échelle du canton de Neuchâtel, l’insuffisance cardiaque entraîne au moins 300 hospitalisations chaque année. Pour optimiser la convalescence de ces patients, les services de médecine interne et de cardiologie du RHNE ont mis en œuvre une filière de prise en charge spécifique sur les deux sites de soins aigus, à Neuchâtel et La Chaux-de-Fonds. Objectif: renforcer la délicate phase de transition entre hôpital et domicile, avec une série de mesures qui se fondent sur les récentes recommandations de la société européenne de cardiologie et d’experts suisses.

 

 

300 hospitalisations par an sont dues à une insuffisance cardiaque dans le canton de Neuchâtel.

En pratique, ce programme pluridisciplinaire implique une collaboration active entre les équipes médico-soignantes de l’hôpital, les médecins de premier recours, les cardiologues traitants ainsi que les équipes de soins à domicile. Il se déploie sur trois phases – hospitalière, transition et ambulatoire – avec pour chacune un protocole d’actions spécifiques. Concrètement, le calendrier de la prise en charge prévoit différentes interventions débutant durant l’hospitalisation (médecin, infirmière spécialisée, diététicienne et physiothérapeute) et se poursuit durant quatre semaines après le retour à domicile. Cette deuxième étape comprend notamment une consultation chez le médecin traitant la première semaine, l’implication des soins à domicile si nécessaire, un check-up à l’hôpital entre le 6e et le 14e jour ainsi qu’un contrôle téléphonique après un mois. Ces actions permettent une reprise optimale du suivi habituel ambulatoire avec le médecin traitant et le cardiologue traitant.

Patient partenaire
Durant la phase de transition après une hospitalisation, le patient est vulnérable. Avec cette prise en charge structurée qui comprend des suivis cliniques rapprochés, nous cherchons à diminuer le risque de réhospitalisation dont l’impact est défavorable sur la qualité de vie », explique le Dr Cyril Pellaton. « La filière mise aussi sur l’éducation thérapeutique, car il est important que le patient soit partenaire de la démarche. Nous mettons l’accent sur une meilleure connaissance de la maladie et des symptômes d’alerte qui doivent inciter à consulter. » Dans son travail d’infirmière spécialisée au sein du service de cardiologie, la pédagogie tient une place importante, témoigne Luisa Marques: « Pendant la phase hospitalière, j’interviens régulièrement auprès des patients pour parler des pathologies et expliquer les signaux d’alerte. Clairement, l’éducation thérapeutique est une composante essentielle, car le patient est partenaire de la prise en charge. Au final, c’est lui qui va faire la différence. Nous sensibilisons les personnes aux éléments à prendre en compte au quotidien pour qu’elles vivent mieux avec la maladie. Par exemple, nous les rendons attentives au fait qu’il est impératif pour elles de surveiller leur tension artérielle et de consulter en cas de prise de poids soudaine. Nous les guidons jusqu’à ce qu’elles retrouvent leur autonomie. » Une fois le patient de retour chez lui, l’infirmière spécialisée l’appelle un mois après sa sortie d’hôpital pour faire un point de sa situation, évaluer ses symptômes et vérifier ses rendez-vous.

Carnet de suivi
Pour aider les patients à rester autonomes, l’hôpital a édité une fiche de contrôle de la maladie ainsi qu’un carnet de suivi conçu par le service de cardiologie avec le concours de plusieurs médecins traitants. Ce calepin a pour vocation d’accompagner le patient au jour le jour, de transmettre les données de suivi aux autres intervenants médicaux, de répertorier les paramètres vitaux quotidiennement et maintenir la liste des médicaments à jour. Il rassemble ainsi toutes les informations concernant la prise en charge, les rendez-vous à venir, la teneur des consultations, les bilans sanguins, les résultats des autocontrôles. Quand le patient a besoin de soins à domicile, ils sont planifiés à sa sortie de l’hôpital, relève le Dr Cyril Pellaton, en précisant « les rôles de tous les partenaires sont intégrés dans la filière dès le premier jour du retour du patient à la maison. »

Essor de la cardiologie à La Chaux-de-Fonds

Depuis le début de cette année, l’offre de cardiologie s’est étoffée sur le site de La Chaux-de-Fonds avec le recrutement d’une cardiologue. La Dre Sabina Rosset, médecin cheffe adjointe, assure désormais une présence hospitalière, conjointement avec les cardiologues de ville. Le but est de répondre promptement aux besoins des divers services hospitaliers ainsi que d’assurer la continuité des certaines prestations cardiologiques préexistantes, notamment l’implantation des stimulateurs cardiaques. Comme à l’hôpital Pourtalès, une filière d’insuffisance cardiaque vient d’être introduite (voire ci-contre). Elle réunit une équipe médico-soignante multidisciplinaire en collaboration avec les médecins traitants, cardiologues installés et soins à domicile. Le service a aussi mis en place un programme de réadaptation cardiovasculaire ambulatoire, comme déjà proposé sur le site de Neuchâtel, afin d’offrir une alternative aux séjours stationnaires. Il permettra aux patients du haut du canton d’avoir une offre personnalisée proche de leur domicile. Après un infarctus ou une chirurgie cardio-vasculaire, les patients peuvent intégrer ce module de 12 semaines, à raison de trois demi-journées hebdomadaires. Physiothérapie, éducation thérapeutique, informations diététiques : le programme vise à améliorer la qualité de vie tout en permettant aux patients de reprendre progressivement leurs activités professionnelles et sociales. « S’ils se sentent assez bien », relève la Dre Sabina Rosset, « ils peuvent travailler à temps partiel durant la réadaptation. »