En collaboration avec Arcinfo, Le Rendez-vous Santé
Les maladies allergiques, atteintes auto-immunes et immunodéficiences sont au cœur de la consultation d’immunologie et allergologie du RHNe. Elle effectue des tests, établit le diagnostic et instaure la prise en charge.
Diagnostic, prise en charge, investigations pour identifier une affection du système immunitaire… Des tâches qui nécessitent souvent une collaboration multidisciplinaire avec d’autres spécialistes. Entretien avec le Dr Guillaume Buss, en charge de la consultation d’immunologie et allergologie du RHNe.
Les allergies augmentent, mais dans quelles proportions?
Au début du 20e siècle, 1% de la population était atteinte de rhino-conjonctivite allergique tandis qu’aujourd’hui, c’est 20 fois plus! La proportion de personnes souffrant de maladies allergiques a nettement augmenté: l’eczéma atopique, les allergies alimentaires, la rhino-conjonctivite ou l’asthme allergiques touchent 30% de la population. Les allergies alimentaires concernent 2% des adultes et 5% des enfants en Suisse. Mais dans certains pays anglo-saxons, leur incidence a explosé ces 30-40 dernières années pour atteindre par exemple près de 10% de la population pédiatrique en Australie.
Connaît-on les causes?
On ne le sait pas de manière exacte, mais des hypothèses sont clairement établies. La hausse n’est pas d’origine génétique, vu le court laps de temps. Ces hypothèses pointent le mode de vie occidental, car les allergies sont moins fréquentes dans les pays en développement. D’ailleurs les migrants qui viennent s’établir dans les régions industrialisées se mettent aussi à développer plus d’allergies. Nous vivons dans un environnement aseptisé, peu exposé au monde bactérien. Par conséquent, notre microbiote est moins diversifié. Ce qui tend à faire réagir le système immunitaire à des allergènes (pollens, aliments) qu’il devrait normalement ignorer. Mais d’autres facteurs environnementaux entrent aussi en ligne de compte.
Comment?
Avec le réchauffement climatique, les saisons de pollinisation sont plus longues. Celle du noisetier commençait fin février jusque dans les années 1990, mais on observe qu’elle peut maintenant démarrer en janvier, voire en décembre! D’autre part, l’élévation de la concentration de CO2 dans l’atmosphère s’accompagne de plus grandes quantités de pollens dans l’air, lesquelles ont doublé ces 30 dernières années. Un facteur aggravant, ce sont les particules fines qui augmentent le potentiel allergénique des pollens dans les muqueuses respiratoires.
«Nous vivons dans un environnement aseptisé, peu exposé au monde bactérien. Notre microbiote est moins diversifié, ce qui tend à faire réagir le système immunitaire à des allergènes qu’il devrait ignorer.» Dr Guillaume Buss, allergologue-immunologue
Une allergie peut-elle survenir à tout âge?
Absolument, elle peut aussi se déclarer à l’âge adulte, vu que la susceptibilité de développer une allergie existe chez 30% de
la population. Cette prédisposition commence souvent par un eczéma atopique, puis peut conduire à une allergie alimentaire ou respiratoire. Les allergies aux médicaments ou aux venins d’abeilles et de guêpes peuvent se déclencher à tous les âges, à condition d’avoir été exposé à l’allergène au moins une fois!
Quelle est la fonction de la consultation d’immunologie-allergologie?
Dans ce domaine, l’organe c’est le système immunitaire. Le service s’occupe principalement de maladies auto-immunes, rares pour la plupart, comme les connectivites ou les vasculites. Elles sont caractérisées par le fait que le système immunitaire va s’attaquer à certains organes, peau, articulations, reins, poumons, etc. Ces maladies nécessitent souvent des investigations multidisciplinaires, nous collaborons donc fréquemment avec d’autres spécialistes, internistes, hématologues, infectiologues, rhumatologues notamment. Si une personne présente par exemple un état fébrile persistant pendant des semaines voire des mois, dont l’origine reste indéterminée malgré des bilans infectiologiques et hématologiques, des investigations immunologiques sont réalisées. Nous traitons aussi les personnes atteintes d’immunodéficiences qui requièrent des perfusions d’anticorps toutes les trois-quatre semaines pour se prémunir d’infections récidivantes potentiellement sévères. Une autre partie de notre activité concerne des personnes hospitalisées ayant développé une réaction allergique sévère à une médication, par exemple, ainsi que les suites d’hospitalisation. Nous menons un travail d’investigation pour rechercher quelle molécule, parmi les médicaments administrés, est à l’origine de l’allergie. Dans certains cas, en l’absence d’alternative, il est possible d’induire une tolérance à un médicament indispensable pour le patient alors qu’il y est allergique.
30% de la population souffre d’eczéma atopique, d’allergies alimentaires, de rhino-conjonctivite ou d’asthme allergiques.
Sait-on ce qui déclenche ces maladies auto-immunes?
Leur origine reste mal connue. Leur survenue est en partie liée à des prédispositions génétiques, mais aussi à des facteurs hormonaux (certaines connectivites sont nettement prédominantes chez les femmes) ou environnementaux: en particulier certaines infections virales, le tabac ou certains médicaments, qui pourraient représenter un facteur déclencheur sans être pour autant la cause unique.
Quels sont les différents stades de gravité des allergies immédiates (aliments, médicaments ou venins)?
Tout dépend des symptômes! Au stade 1, le corps se couvre d’urticaire; au stade 2, le visage ou une autre partie du corps gonfle; le stade 3 est caractérisé par des difficultés respiratoires et/ou à parler ou avaler (dues à un rétrécissement du larynx), signes d’une urgence absolue; quant au stade 4, c’est le choc anaphylactique: la personne peut perdre connaissance et potentiellement mourir. Ces deux dernières catégories sont donc des urgences vitales. Mais dans la plupart des cas, on en reste aux deux premiers stades.
Comment y remédier?
Une désensibilisation peut être envisageable pour les personnes fortement allergiques par exemple aux pollens, acariens, venins de guêpe et d’abeille. Le principe? Leur organisme est mis en contact avec une dose d’allergène (comprimés sublinguaux ou injections sous-cutanées) qui est ensuite progressivement augmentée. Le système immunitaire s’habitue ainsi à l’allergène sans développer de réaction. «La désensibilisation dure en général trois ans pour les pollens, cinq ans pour les venins», précise le Dr Buss, en relevant que certaines personnes reviennent pour des doses de rappel avant la saison de pollinisation. Selon l’allergologue, «après trois ans de traitement, on peut s’attendre à une amélioration de l’ordre de 50 à 70%».
Conférence publique:
Une conférence publique des Jeudis du RHNe intitulée «Allergies, comment y remédier» est organisée à l’auditoire du site de Pourtalès, à Neuchâtel, le 20 juin à 19h, en partenariat avec la fondation admed. Elle traitera, entre autres, de l’augmentation du nombre des cas, du diagnostic et des traitements en cas d’allergie.
Intervenant·e·s:
Dr Guillaume Buss, médecin-chef adjoint, service d’immunologie et allergologie, RHNe
Christine Monnier, FAMH en immunologie clinique, directrice adjointe admed laboratoires
Entrée libre. La conférence est diffusée en direct sur la page Facebook du RHNe.
Prochains rendez-vous des Jeudis du RHNe:
Toutes les conférences ont lieu à 19h, à l’auditoire du site de Pourtalès, à Neuchâtel. L’entrée est libre. Diffusion en live sur la page Facebook du RHNe.
22 août 2024 – Activité physique et grossesse, une bonne idée?
26 septembre 2024 – Les clés pour bien vieillir
24 octobre 2024 – La mammographie, entre mythes et réalité
Voir tous les prochains rendez-vous
Voir les dernières conférences des Jeudis du RHNe:
Tout savoir sur les risques liés aux tiques
Les hôpitaux face au défi de la transition énergétique
Et si la polyarthrite s’invitait plus tôt que prévu dans mon quotidien?
Insuffisance cardiaque: quand le coeur est fatigué