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En collaboration avec Arcinfo, Le Rendez-vous Santé 

Par Brigitte Rebetez
Dre Michelle Grämiger, Dr Nikolaos Evangelopoulos et Pr Roland Chautems

L’unité d’uro-gynécologie rassemble notamment l’urologue Michelle Grämiger, le gynécologue Nikolaos Evangelopoulos et le chirurgien colorectal Roland Chautems (de gauche à droite). Photo © Guillaume Perret

URO-GYNÉCOLOGIE – Les dysfonctions du plancher pelvien peuvent péjorer la qualité de vie. Pour identifier les causes et proposer des solutions adaptées, la consultation du RHNe propose une approche pluridisciplinaire.

Par gêne ou par méconnaissance des options thérapeutiques, les femmes font encore trop souvent le dos rond face à une pathologie du plancher pelvien. Pourtant, la qualité de vie peut s’en trouver plus ou moins impactée. Comme les causes et les effets du problème diffèrent d’une patiente à l’autre, l’unité uro-gynécologique du Réseau hospitalier neuchâtelois (RHNe) travaille de manière pluridisciplinaire pour apporter des réponses personnalisées. Éclaircissements sur son mode de fonctionnement avec le Dr Nikolaos Evangelopoulos, responsable de la consultation d’uro-gynécologie.

 

À quelles pathologies s’adresse l’unité d’uro-gynécologie?
L’uro-gynécologie s’occupe des différentes formes d’incontinence urinaire, de la vessie hyperactive et d’autres troubles mictionnels, ainsi que du prolapsus génital et de ses conséquences fonctionnelles – qui vont d’une gêne vaginale avec un retentissement variable sur la qualité de vie, aux troubles sévères de la défécation. Nous proposons également une consultation spécialisée en périnéologie, avec une évaluation systématique (à trois mois environ) de lésions sévères suite à un accouchement.

Comment s’organise la prise en charge?
Nous commençons par une anamnèse complète et un examen clinique ciblé. Nous regardons ainsi quelle est la plainte de la patiente et quel pourrait être son lien avec la pathologie que nous objectivons. En arrivant, certaines femmes craignent d’être adressées d’emblée au bloc opératoire, mais ce n’est de loin pas la règle: pour quasiment la totalité des affections concernées, nous proposons en première intention quelques séances de physiothérapie spécialisée. Pour l’incontinence urinaire d’effort, elle pourrait être complétée par la laserthérapie (lire l’encadré).

Concernant l’incontinence d’urgence et la vessie irritable, une médication peut être proposée, ou encore une électrostimulation (TENS) que la patiente peut pratiquer seule à son domicile. Cette option, qui fonctionne à l’aide de deux patchs sur la cheville, est souvent efficace et sans effets indésirables.

Pour la descente des organes symptomatique, nous proposons couramment le pessaire, un dispositif vaginal en silicone qui soutient les organes, qui peut être à la fois une solution efficace à long terme pour certaines patientes, mais aussi une source importante d’informations pour la stratégie thérapeutique supplémentaire. Pour sa mise en place, nous proposons un accompagnement par nos physiothérapeutes spécialisés, ce qui garantit une utilisation correcte et une meilleure adhésion au traitement.

L’unité d’uro-gynécologie travaille de manière pluridisciplinaire…
Effectivement, car l’équipe comprend une urologue (Dre Michelle Grämiger), un chirurgien colorectal (Pr Roland Chautems), une équipe de physiothérapeutes spécialisée en pelvi-périnéologie (Mme Coral Lopez est la référente de filière) et moi-même pour la gynécologie.

Cette collaboration signifie non seulement qu’il peut exister plusieurs portes d’entrée pour une prise en charge spécialisée, selon la plainte prédominante, mais aussi qu’il y a parfois un travail à plusieurs, afin de garantir le meilleur résultat possible sur les différents aspects d’une même affection. En outre, l’unité d’uro-gynécologie se réunit en «board» multidisciplinaire pour discuter de certains dossiers plus complexes et, au besoin, se concerter sur une prise en charge pluridisciplinaire.

Quand un traitement de première ligne ne s’avère pas satisfaisant, quelles sont les options?
La chirurgie reste le traitement de référence pour l’incontinence urinaire d’effort persistante et pour le prolapsus génital gênant ou symptomatique. L’examen urodynamique permet d’examiner le fonctionnement de la vessie et de trouver une solution adaptée. Pour le premier cas, la solution la plus connue consiste à poser une bandelette sous l’urètre, à la manière d’un hamac. Cette intervention mini-invasive, réalisée en ambulatoire par voie naturelle (vaginale), est efficace à près de 90% sur quinze ans et n’occasionne qu’une petite cicatrice au niveau du vagin.

Pour ce qui est de l’incontinence urinaire par impériosité, dans certains cas réfractaires nous proposons des injections de Botox au niveau de la vessie; dans d’autres, nous discutons de l’indication d’une neuromodulation sacrée, qui fonctionne à la manière d’un pacemaker, également préconisée chez certains patients qui présentent une incontinence fécale.

«L’incontinence urinaire concerne près d’une femme sur deux à 60 ans, mais seule une sur trois en parlera spontanément en consultation.» Dr Nikolaos Evangelopoulos, responsable de la consultation d’uro-gynécologie au RHNe

Et lors de prolapsus génital?
Si la chirurgie s’avère nécessaire, il y a globalement deux modes opératoires qui sont tous deux considérés comme mini-invasifs, avec un séjour hospitalier de courte durée. L’un, effectué par laparoscopie, consiste à poser une prothèse de soutien. Dans l’autre cas de figure, le chirurgien utilise du tissu de la patiente pour réaliser une fixation sur les ligaments, en intervenant par voie naturelle.

Les problèmes uro-gynécologiques sont-ils fréquents?
Ces pathologies augmentent avec l’âge, mais elles peuvent aussi survenir plus tôt. L’incontinence urinaire touche près d’une femme sur deux à 60 ans, mais seule une sur trois en parlera spontanément en consultation. Il est plus délicat de chiffrer les prolapsus génitaux (descente de l’utérus ou du fond du vagin, du rectum, de la vessie, ou souvent une association des trois). Mais si l’on s’en tient à sa classification anatomique, c’est une affection très fréquente pour laquelle 10 à 20% des femmes passeront les portes du bloc opératoire, en fonction de son impact sur la qualité de vie.

Nouvelles options avec la laserthérapie

Introduite récemment au RHNe, «la laserthérapie est entrée dans les guidelines pour traiter l’incontinence urinaire à l’effort, l’atrophie vulvo-vaginale, le prolapsus pelvien léger ou le lichen scléreux, explique la médecin-cheffe Cristina Manea. Elle est validée par plusieurs études cliniques, dont une impliquant deux hôpitaux suisses, publiée en 2023.»

Dans les cas d’incontinence urinaire à l’effort, le laser est utilisé pour créer un échauffement contrôlé du tissu vaginal. La formation de collagène s’en trouve stimulée, ce qui a pour effet de mieux soutenir la vessie. La laserthérapie est proposée en deuxième ligne, lorsque la physiothérapie ne produit pas le résultat attendu.

«Elle comprend trois séances ambulatoires indolores de 15-20 minutes, à quatre-six semaines d’intervalle. Son effet dure entre 18 et 24 mois, après quoi elle peut être répétée si nécessaire, détaille la gynécologue. Cette thérapie peut permettre de repousser une intervention chirurgicale, notamment chez des patientes jeunes. Il est aussi possible de l’effectuer entre des grossesses, passé un délai de trois mois après un accouchement.»

Dans le cas de l’atrophie vulvo-vaginale, «le laser permet aux patientes d’avoir une vie de couple confortable, sans devoir recourir à des produits comme des ovules, crèmes ou gels vaginaux. Cette thérapie convient en particulier aux femmes ayant une contre-indication à un traitement hormonal.»

Pour l’instant, cette laserthérapie n’est pas remboursée par l’assurance maladie.