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Le Centre de l’obésité du RHNE propose une prise en charge médico-chirurgicale aux personnes atteintes d’obésité sévère. Témoignages de deux patients qui ont fait le choix d’un by-pass.

 Photos © Guillaume Perret / Lundi13

 En fixant la date de son opération, François* s’est senti soulagé, précisant même qu’il «se réjouissait» de cette perspective. Comme tous les patients pris en charge au Centre de l’obésité du Réseau hospitalier neuchâtelois (RHNE) pour une chirurgie bariatrique, il s’y était préparé depuis un an. «J’ai eu des consultations individuelles avec un chirurgien, une endocrinologue, une psy… Le suivi comprend aussi des cours collectifs. En commençant, j’avais l’impression de me retrouver dans une séance Weight-Watchers (rires), mais en fin de compte, l’expérience s’est avérée assez amusante. Entre participants, les liens se sont resserrés et nous avons échangé sur nos expériences respectives.» C’est ce constat d’échec qui a incité le Neuchâtelois de 74 ans à envisager un by-pass gastrique: «Je n’arrivais pas à régler mon surpoids par moimême, ni en consultant une diététicienne.» Son problème remonte à 30-40 ans, s’accentuant au fil du temps. Il se souvient encore de l’attitude cavalière d’un cardiologue sur son poids durant une consultation à l’époque. Et de souligner «qu’il y a eu une évolution positive au sein du corps médical à l’égard de l’obésité.» S’il s’est finalement décidé pour la chirurgie bariatrique, c’est parce que sa condition s’est dégradée avec l’âge. «Tout ce que je fais est plus fatigant: je n’ai plus de plaisir à marcher, j’ai dû renoncer à visiter des villes car je n’arrivais plus à suivre les groupes. On finit par ne plus rien faire… Avec le bypass, j’espère retrouver de la qualité de vie, de l’agilité, une meilleure santé et pouvoir bouger sans avoir mal partout, ni de difficultés à respirer.»

Mais le 24 octobre (à jour J-4), l’hôpital prévient le patient que toutes les interventions non urgentes sont suspendues pour faire face à l’afflux de malades
du Covid-19. François reste zen, faisant remarquer qu’il n’était pas vraiment surpris, au vu de la péjoration de la situation sanitaire. «En fait, le report me
convient dans la mesure où je n’avais pas envie de me retrouver à l’hôpital dans ces circonstances. Je préfère attendre que les choses soient plus calmes pour tout le monde.» Isabelle, pour sa part, a été opérée en 2019. Elle affirme tout de go que le by-pass lui a changé la vie: «Je refais plein de choses que j’avais dû laisser tomber, même du ski. Je peux patiner avec mes enfants, monter les escaliers sans être essoufflée, c’est une deuxième chance pour moi!» En rigolant, elle ajoute qu’en matière de garde-robe, «c’était moins pratique: je suis passée de la taille 46 à 34, alors il a fallu tout changer.» Avant elle, son mari avait été opéré d’un bypass, mais c’est surtout à cause d’un risque cardio-vasculaire qu’elle a choisi de faire de même. Comme le prévoit le protocole, la jeune quadragénaire continue d’être suivie au Centre de l’obésité et tient à préciser que «l’équipe est vraiment top! Je vois la diététicienne tous les 6 mois, idem pour l’endocrinologue qui vérifie s’il y a des carences en vitamines et fer, et je vais retourner chez la psychologue en décembre.»

Avec le by-pass, j’espère retrouver une meilleure santé et pouvoir bouger sans avoir
de difficultés à respirer. Un patient qui s’apprête à se faire opérer

Diminuer la taille de l’estomac
Le by-pass gastrique consiste à réduire la taille de l’estomac et court-circuiter une portion d’intestin. Selon les critères de l’OFSP, elle peut être réalisée sur des patients avec un IMC de 35 ou plus. L’an dernier, 160 interventions de chirurgie bariatrique ont été réalisées au RHNE. La tendance est à la hausse depuis plusieurs années. L’opération, pratiquée par laparoscopie, dure 60 à 90 minutes. L’hospitalisation est courte (1 à 3 jours). «Cette intervention est extrêmement protocolée pour réduire les risques de complications au minimum», commente le Dr Alend Saadi, médecin chef dans le Département de chirurgie. «Vu que le Centre de l’obésité du RHNE est accrédité par la Société suisse pour l’étude de l’obésité morbide et les troubles métaboliques comme centre de référence depuis 2017, nous sommes audités régulièrement.» Si l’opération du bypass est la plus fréquente en chirurgie bariatrique, le Pr Marc Worreth et le Dr Alend Saadi réalisent aussi d’autres types d’interventions, comme la gastrectomie longitudinale ou sleeve en fonction de la condition du patient. Le Centre de l’obésité et des maladies métaboliques du RHNE réunit des chirurgiens, diabétologues endocrinologues, diététiciennes, psychiatres/psychologues du CNP, des référents d’autres départements de l’hôpital (gynécologue ou gastro-entérologue par exemple) et travaille avec un réseau de professionnels du canton. Car chaque parcours de chirurgie bariatrique fait l’objet d’un suivi pluridisciplinaire personnalisé avant (pendant un an) et après l’opération (à vie). «Les patients sont préparés au plan psychologique, diététique, etc. C’est un parcours qui peut paraître long, mais nécessaire, car ils s’apprêtent à vivre un redémarrage», analyse le Dr Saadi.
«Certains patients y réfléchissent depuis des années. Alors quand ils font le pas dans leur esprit, une étape importante a été franchie!»

*Prénom d’emprunt

Obésité et Covid-19

Dès les prémices de la pandémie de Covid-19, une équipe pluridisciplinaire au RHNE s’est réunie pour traiter des risques encourus par les personnes en fort surpoids. «Autour du 20 mars, nous avons décidé d’envoyer une lettre d’information aux patients suivis pour obésité», relate le Dr Alend Saadi. Deux mois plus tard, l’OFSP incluait les IMC (indice de masse corporelle) de plus de 40 (obésité de grade 3) parmi les facteurs à risque de déclencher une évolution grave. Mais en présence d’autres maladies associées, on court le risque «de développer des complications, même avec un IMC inférieur à 40», prévient le médecin chef du Département de chirurgie. «L’obésité est une maladie métabolique chronique et le Covid-19 vient encore nous le rappeler. D’où l’importance d’une prise en charge sérieuse et adéquate.» Concrètement, «les personnes obèses ont un risque accru d’évolution grave en cas de Covid-19, y compris si elles sont jeunes, mais dans ce cas la fréquence moindre», explique le Dr Olivier Clerc, infectiologue. Les raisons? «D’une part, l’obésité est souvent accompagnée d’autres comorbidités métaboliques (hypertension, diabète) qui confèrent elles aussi un risque plus élevé. D’autre part, des hypothèses évoquent un effet propre de médiateurs inflammatoires produits par les cellules adipeuses.» Pour prévenir ces complications, l’infectiologue indique qu’il est important «que les comorbidités associées à une obésité, comme l’hypertension ou le diabète, soient le mieux équilibrées possible grâce à un suivi du médecin généraliste.»