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Céine Mercier

Juin 26, 2025 | Actualités, Témoignage

«Aujourd’hui, je suis apaisée et pleine de gratitude»

Par Clémence Planas

Comment envisager sa vie lorsque l’on apprend que sa fin est proche ? Céline Mercier est atteinte de la maladie de Charcot, une pathologie incurable. Les médecins lui donnaient trois à cinq ans à vivre. Sept ans après l’annonce du diagnostic, la jeune femme, dynamique et pleine de vie, profite de chaque seconde qui passe et envisage l’avenir avec sérénité. Témoignage.

Céline Mercier

Céline Mercier © Guillaume Perret

Il y a sept ans, à tout juste 23 ans, Céline Mercier a vu sa vie basculer. On lui diagnostique une sclérose latérale amyotrophique (SLA), plus communément appelée «maladie de Charcot»: «J’étais alors en pleine reconversion professionnelle pour devenir ingénieure agronome dans une ferme jurassienne. Cette annonce a été un tsunami.»

Céline connaît la maladie: sa mère et son grand-père en sont décédés quelques années auparavant. Les premiers symptômes apparus en novembre 2017, un mal de dos et une difficulté à se mettre sur la pointe des pieds, l’ont donc tout de suite alertée: «J’ai immédiatement appelé le médecin qui suivait ma maman. Il m’a envoyé faire une série d’examens aux HUG. Après deux semaines de tests, les résultats sont tombés. Je me suis vue mourir très vite.»

Du Japon à la Guadeloupe

À l’heure actuelle, il n’existe aucun traitement pour guérir la SLA. Cette pathologie neurodégénérative, héréditaire dans un cas sur dix, entraîne une paralysie progressive des muscles, jusqu’à la tétraplégie, sans altération des capacités intellectuelles ou cognitives. En fin de vie, la personne atteinte n’est plus capable de respirer ou de se nourrir seule. Les médecins donnent à Céline une espérance de vie de trois à cinq ans: «Ma maman est partie en deux ans et demi. Mon grand-père en un an et demi, après avoir eu recours à Exit, l’association d’assistance au suicide.»

«Il est hors de question de finir tétraplégique. Je veux décider du moment où je m’en irai.»

Les premiers mois qui ont suivi le diagnostic ont été particulièrement éprouvants pour la jeune femme: «Dès qu’il a su que j’étais malade, mon père m’a dit que je n’avais pas le choix, qu’il fallait que je me batte. Je lui ai répondu que oui, j’avais le choix.» Céline arrête alors sa formation et se renferme sur elle-même «de peur de faire souffrir mes proches si je venais à décéder rapidement.» Elle décide d’organiser ses funérailles et s’inscrit, à son tour, à Exit: «Il est hors de question de finir tétraplégique. Je veux décider du moment où je m’en irai. J’étais présente lorsque mon grand-papa est décédé. Il était tellement convaincu de sa décision que les au revoir n’ont pas du tout été traumatisants.»

Céline Mercier

Céline Mercier © Guillaume Perret

Il a fallu six mois à Céline pour faire le choix de se battre contre la maladie et six mois supplémentaires pour envisager de nouveaux projets: «Pour mes 24 ans, mes amis m’ont offert un voyage au Japon. J’en rêvais mais je n’osais pas l’envisager en fauteuil roulant. Deux mois plus tard, j’y suis allée et c’était incroyable! Je me suis rendue compte que les barrières que je me mettais n’étaient pas dans mon corps, mais dans ma tête!»

La Jurassienne enchaîne alors les périples autour du monde: la Guadeloupe puis à nouveau le Japon. De retour en Suisse, c’est aussi en posant des mots sur ces maux que la jeune femme trouve l’apaisement.

Son autobiographie «Sur la pointe des pieds», en référence à ses premiers symptômes, sort en 2022. Articles de journaux, plateaux-télés, interviews radio, Céline devient peu à peu le visage romand, voire au-delà, de la SLA: «J’avais besoin de faire connaître cette maladie et d’éventuellement lever des fonds pour la recherche.»

En mars 2023, elle organise une marche solidaire intitulée «SLAvancer», dans la commune de Vicques (JU). Les bénéfices de la manifestation – 11 000 francs – ont été entièrement reversés à l’Association française pour la recherche sur la SLA (ARSLA).

«Je profite de chaque minute, chaque heure, chaque jour qui passe, sans penser à la maladie.»

Aujourd’hui, Céline Mercier a trouvé la paix intérieure: «Je profite de chaque minute, chaque heure, chaque jour qui passe, sans penser à la maladie. Je suis apaisée et pleine de gratitude. J’ai appris à vivre grâce à la SLA.»

Céline Mercier avec son chien ©Guillaume Perret

Céline Mercier avec son chien ©Guillaume Perret

Les symptômes de la jeune femme restent relativement stables: «À l’annonce de ma maladie, les médecins m’ont conseillé de me déplacer le plus possible en fauteuil roulant pour ne pas trop solliciter mes muscles. Aujourd’hui, je ne l’utilise que par moments, pour faire mes courses ou promener mon chien. Je ne ressens aucune douleur, la SLA ne fait pas mal, mais j’ai parfois la sensation de jambes lourdes et, en période hivernale, que le bas de mon corps est gelé.»

La Jurassienne s’interroge désormais sur une possible maternité, dont elle avait pourtant fait le deuil: «Avoir un enfant n’est pas dans mes plans à court terme, mais je ne suis plus aussi catégorique qu’avant. Avec les progrès de la médecine, la maladie peut être détectée à l’état embryonnaire (ndlr: lors d’un diagnostic préimplantatoire dans le cadre d’une fécondation in vitro). Mais je m’inquiète surtout sur ma capacité à m’occuper d’un bébé.»

En mars 2025, Céline Mercier a eu trente ans. Un cap qu’elle n’imaginait pas franchir il y a encore quelques années. Elle l’a fêté dignement, entourée de ses amis, de sa famille et de son compagnon, à l’occasion d’un bal: «J’ai pris conscience que tout est éphémère, alors je profite à fond!»

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