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En collaboration avec Arcinfo, Le Rendez-vous Santé, par Brigitte Rebetez

La docteure Sandra Van Den Broecke, pneumologue et somnologue, directrice du Centre de médecine du sommeil du Réseau hospitalier neuchâtelois. Photo: Guillaume Perret

La Dre Sandra Van Den Broecke. Photo: Guillaume Perret

En plus de déranger, le ronflement peut être associé à une maladie telle que l’apnée obstructive du sommeil. Le point sur les traitements avec la directrice du Centre de médecine du sommeil du RHNe, la Dre Sandra Van Den Broecke.

Son volume sonore peut atteindre les 80 décibels, soit autant qu’une voiture thermique en circulation. Le ronflement concerne environ 40% de la population adulte, dont 60% d’hommes de 40 ans et plus. Un phénomène qui peut devenir cauchemardesque pour le patient mais aussi pour le ou la partenaire de lit et révéler un trouble sérieux comme l’apnée obstructive du sommeil. Quand faut-il s’en inquiéter? Et quelles sont les parades pour y mettre fin? Nos questions à la Dre Sandra Van Den Broecke, pneumologue et somnologue, directrice du Centre de médecine du sommeil du Réseau hospitalier neuchâtelois (RHNe).

D’où viennent les ronflements?
Le ronflement est induit par une vibration des tissus mous des voies aériennes supérieures durant le sommeil. Le bruit est émis à l’inspiration, parfois aussi à l’expiration. Il peut être accentué par un rhume, une grosse fatigue et l’âge, entre autres. Certains facteurs comme le surpoids, la consommation d’alcool ou de tabac favorisent le phénomène. Le problème peut aussi avoir une origine positionnelle: des personnes ne ronflent que lorsqu’elles dorment sur le dos mais pas dans les autres positions. Ronfler n’est pas une maladie, cependant le ronflement peut être associé à une maladie, d’où l’intérêt de savoir s’il cache quelque chose.

Ce n’est donc pas anodin…
Le ronflement a souvent des conséquences sociales, qui se traduisent par des conflits avec le ou la partenaire. Il ne faut pas les négliger et identifier la cause du phénomène. Les médecins ORL consacrent bon nombre de leurs consultations à ce symptôme. Si le fait de ronfler est associé à une importante fatigue et de la somnolence durant la journée, il vaut la peine de consulter un pneumologue somnologue car on peut être en présence d’un syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS).

Quand faut-il traiter le syndrome d’apnées obstructives?
Les patients nous sont généralement adressés par leur généraliste en raison d’une plainte – un sommeil non réparateur, par exemple –, ou par des médecins spécialistes, car certains problèmes de santé nécessitent qu’on dépiste l’apnée du sommeil. C’est notamment le cas des personnes ayant subi un AVC, vu que les apnées du sommeil augmentent le risque de maladies cardiovasculaires, de diabète et d’hypertension.

La prévalence est-elle la même entre hommes et femmes?
L’apnée obstructive du sommeil concerne deux fois plus d’hommes que de femmes, mais leurs symptômes sont souvent différents: chez les messieurs, elle se manifeste par des ronflements, des arrêts respiratoires durant le sommeil et de la fatigue diurne; en revanche, les femmes atteintes du syndrome ont plutôt tendance à ressentir des maux de tête le matin, des troubles digestifs, des va- riations de l’humeur et/ou un état dépressif.

Comment établissez-vous le diagnostic?
En cas de suspicion d’apnée obstructive du sommeil, nous effectuons une polygraphie ventilatoire. Nous recevons le patient en fin d’après-midi pour l’équiper de différents capteurs, tous reliés à un petit enregistreur. Il rentre dormir à la maison et revient ensuite le lendemain matin avec l’appareil. Nous réalisons aussi des polysomnographies, un examen de référence qui investigue le sommeil au sens large, quand nous soupçonnons des apnées et d’autres maladies du sommeil, comme des mouvements périodiques des jambes ou des somnolences diurnes. Les apnées obstructives du sommeil peuvent survenir plus ou moins fréquemment: entre cinq et quatorze par heure le syndrome est léger, mais dès 30 apnées/heure, il est considéré comme sévère. En fonction des symptômes et des comorbidités du patient, nous préconisons un traitement. Le plus courant, c’est la thérapie par CPAP (Continuous Positive Airway Pressure): il s’agit d’une attelle pneumatique qui permet de maintenir les voies respiratoires ouvertes grâce à un appareil qui envoie un flux d’air dans un masque que le patient porte durant son sommeil.

Existe-t-il d’autres options?
Si le problème est d’origine morphologique, nous pouvons proposer une orthèse d’avancée mandibulaire qui mainient la mâchoire inférieure en avant pour libérer le passage à l’arrière de la cavité buccale pendant que la personne dort. Lorsque la cause est positionnelle, il existe plusieurs moyens d’amener le patient à dormir sur le côté plutôt que sur le dos. Si ces traitements ne devaient pas donner satisfaction, reste une solution alternative qui est pratiquée depuis quelques années dans des centres universitaires: la stimulation électrique du nerf hypoglosse (qui commande le muscle le plus volumineux de la langue) par le biais d’un neurostimulateur implanté sous la clavicule. Ce système, qui fonctionne à la manière d’un pacemaker, permet de maintenir les voies respiratoires ouvertes pendant le sommeil, mais il n’est pas remboursé par l’assurance maladie de base. Et du côté des médicaments, il n’existe pas de solution thérapeutique probante à ce jour.

L’apnée représente-t-elle une part importante des consultations au Centre du sommeil?
Le Centre a été ouvert il y a sept ans et nous constatons une tendance à la hausse des problèmes de sommeil. Les deux principales maladies que nous traitons sont l’apnée obstructive du sommeil et l’insomnie. Les troubles du sommeil sont devenus une source de préoccupation au sein de la population. En outre, la fatigue chronique augmente les risques de dépression, de burn-out et le développement de pathologies cardiovasculaires, entre autres. Pour mener des investigations pertinentes, le Centre réunit une équipe médicale pluridisciplinaire comprenant une psychiatre, une neurologue et moi-même pour la partie pneumologie et somnologie.

 

Conférence sur le ronflement

Le 23 janvier, le RHNe organisait cette conférence sur le thème «Je ronfle, quels sont les risques et les traitements?» dans le cadre des Jeudis du RHNe. La Dre Sandra Van Den Broecke, médecin-cheffe du service de pneumologie et directrice du Centre de médecine du sommeil, ainsi que par le Dr Adrian Schubert, médecin-chef adjoint du service ORL et de chirurgie cervico-faciale, ont notamment expliqué comment le ronflement, souvent perçu comme une simple nuisance sonore, pouvait affecter la santé globale, diminuer la concentration, voire réduire l’espérance de vie à long terme. Ils ont également révélé quels changements d’habitudes permettaient de réduire le ronflement. À l’issue de la conférence, les deux intervenant-e-s ont encore répondu aux questions du public.

Retrouvez toutes les conférences passées des Jeudis du RHNe, ainsi que le programme, ici.

 

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