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La PD Dre Susanne Renaud, médecin-cheffe du service de neurologie du RHNe

Femmes-phares: des conférences pour mettre en lumière des parcours inspirants

Propos recueillis par Trinidad Barleycorn

À l'intiative de la PD Dre Susanne Renaud, le RHNe inaugure un nouveau rendez-vous. À travers les témoignages de femmes aux parcours remarquables, cet événement, dédié pour l'instant aux collaboratrices et collaborateurs de l'institution, offrira un espace d’échange et de réflexion sur les inégalités de genre.

Le 17 mars, la première édition des conférences Femmes-phares explorera les inégalités de genre à travers les parcours de deux femmes inspirantes. Pour cette première, l’événement est réservé aux collaborateur-rice-s du RHNe.

Dans le cadre des échanges organisés chaque année à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, le RHNe lance, le 17 mars, la première conférence Femmes-phares, un nouveau rendez-vous appelé à se pérenniser.

À l’initiative de la PD Dre Susanne Renaud, ces rencontres offriront un espace de réflexion sur l’égalité des genres, où des femmes inspirantes partageront leur parcours et échangeront avec le public.

Pour cette première édition, placée sous le thème «Comment briser le plafond de verre?» et modérée par Caroline Plachta, associée et co-fondatrice de Plachta & Fischer, membre du Cercle suisse des administratrices et chargée d’enseignement à l’Unine, les invitées seront:

Médecin-cheffe du service de neurologie du RHNe, vice-présidente de Women in Neurology, membre fondatrice en 2024 de l’Association suisse des médecins-cheffes, une nouvelle section de Medical Women Switzerland, mariée et mère d’enfants de 21 et 23 ans, la PD Dre Renaud revient sur son engagement en faveur de l’égalité des genres et les obstacles que les femmes rencontrent encore dans le milieu professionnel. Interview.

Comment est née l’idée de ce cycle de conférences Femmes-phares ?

PD Dre Susanne Renaud: Depuis que je suis devenue membre du comité des médecins-cheffes suisses, j’ai pris contact avec plusieurs médecins-cheffes du RHNe pour échanger sur les moyens de promouvoir l’équité pour les femmes médecins. Nous avons notamment développé l’idée d’organiser une conférence autour de la question de la grossesse pour les médecins assistantes et de créer un groupe de réseautage pour les médecins-cheffes. C’est la PD Dre Alix Stern qui a eu l’idée d’organiser les conférences Femmes-phares, c’est-à-dire avec des femmes inspirantes invitées à partager leur expérience.

Comment avez-vous sélectionné les deux premières intervenantes, Claire Charmet et Nicole Baur?

Mme Charmet nous est apparue comme une évidence: elle a mené une carrière brillante et va bientôt – malheureusement pour nous – quitter le RHNe pour prendre la direction générale du CHUV. De son côté, la Dre Stern avait suggéré d’inviter une personnalité politique et avait pensé à Mme Baur. Il nous a semblé intéressant de croiser les regards de ces deux femmes aux parcours remarquables. Elles ont immédiatement accepté notre invitation.

Quels sont les principaux obstacles que les femmes rencontrent encore aujourd’hui dans leur carrière, notamment dans le domaine médical ?

Au niveau des postes de médecins assistantes et cheffes de clinique, il n’y a heureusement plus tellement de différences entre hommes et femmes. Les salaires sont régis par un contrat de droit public, encadré par une CCT pour le RHNe, et dépendent de l’expérience, et non du genre.

En revanche, dès que l’on accède à des postes de cadre, le nombre de femmes chute drastiquement. En Suisse, seuls 18% des médecins cadres sont des femmes selon les statistiques des médecins FMH 2023, alors qu’elles représentent 70 % des médecins assistants. En neurologie, il n’y a jamais eu de femme cheffe d’un département universitaire depuis la création de la neurologie suisse, il y a 110 ans !

Par ailleurs, dès qu’une marge de manœuvre pour les salaires existe – ce qui est le cas pour les contrats des cadres avec une part variable –, les hommes gagnent en général davantage, car ils exercent souvent dans des spécialités qui sont mieux valorisées par les systèmes tarifaires en vigueur. Il manque aussi des modèles de travail qui puissent intégrer les besoins des jeunes médecins assistantes. Beaucoup d’entre elles se résignent avant même de démarrer leur carrière, car elles ne voient pas comment concilier vie de famille et engagement professionnel sans s’épuiser.

Pour les postes de médecins cadres, il n’y a pas d’heures supplémentaires: on travaille selon les besoins de l’hôpital, ce qui signifie souvent des semaines de 55 à 60 heures. De nombreuses jeunes femmes n’imaginent pas pouvoir assumer une telle charge de travail tout en ayant une famille. Elles ont besoin de modèles qui montrent que c’est possible.

Qu’en est-il selon vous au RHNe ?

Je ne connais pas précisément le nombre de femmes cadres au RHNe ni leur proportion par rapport aux postes existants. (Le RHNe est le premier hôpital de Suisse à avoir une certification FairOnPay+ validée par une entité externe et qui garantit le respect de l’égalité salariale entre femmes et hommes, ndlr). Mais il faut savoir que les rémunérations des médecins cadres sont difficiles à comparer entre disciplines. Par exemple, il n’y a tout simplement pas d’autre chef de service en neurologie au RHNe. Et quand je me compare à mes homologues hommes d’autres cantons, qui gagnent d’ailleurs tous plus que moi, on me dit que la comparaison n’est pas pertinente…

Il est aussi frappant de constater que les spécialités médicales les plus lucratives, notamment les professions chirurgicales, sont majoritairement exercées par des hommes. À l’inverse, les femmes cadres se trouvent plutôt dans les disciplines en bas de l’échelle de salaire, selon la grille salariale Tarmed pour les médecins installés. Ces perspectives salariales dans le secteur privé influencent également les négociations salariales à l’interne du RHNe.

Le RHNe permet aussi à certains médecins cadres de réduire leur temps de travail au sein de l’institution et d’exercer, par exemple d’opérer, dans une structure privée. Cette activité, plus lucrative, n’apparaît pas dans les statistiques du RHNe. Personnellement, je ne connais que des hommes qui travaillent selon ce modèle.

Je suis convaincue que les salaires des cadres, y compris les montants des parts variables, devraient être rendus transparents. En Suisse, parler d’argent reste un tabou, mais cette tradition entretient des inégalités salariales. D’autant plus qu’il s’agit ici d’argent public.

Même le comité de notre organe représentatif des médecins cadres au RHNe (le groupement médecins hospitaliers (GMH) a toujours été exclusivement masculin…. Nous espérons que cela va changer bientôt, car nous sommes en train de le renouveler, avec des votations en cours et plusieurs candidates.

Finalement, je souhaiterais qu’il ne soit pas nécessaire de passer par une task force quand on veut remplacer une collègue enceinte pendant son congé maternité. Cela devrait être une évidence pour les médecins.

Quels messages ou conseils aimeriez-vous que les participantes et participants retiennent de ces échanges ?

Les jeunes médecins assistantes ne réalisent pas toujours qu’aujourd’hui, une femme médecin installée gagne 25 % de moins qu’un homme pour le même nombre d’heures de travail, selon une étude de l’Office fédéral de la statistique parue en 2022. Beaucoup prennent conscience de cette réalité de manière brutale, souvent après la naissance de leur premier enfant, lorsqu’elles doivent jongler entre une profession très exigeante et une vie de famille.

Je souhaite leur montrer qu’il est possible de devenir cadre tout en ayant une famille. Mais pour y parvenir, elles doivent oser revendiquer leurs droits et surtout négocier avec leur partenaire pour obtenir du soutien.

La lutte pour l’équité entre femmes et hommes est pour moi nécessaire, mais elle concerne aussi les hommes. Nous nous battons pour une répartition plus transparente de l’argent et du pouvoir, ce qui, au final, leur est également profitable.

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